BD, Tome V, Réparations exécutées dans l’église Notre-Dame de Montbrison – Communication de MM. Jamot, architecte, et l’abbé C. Peurière, archiprêtre, curé de Notre-Dame., pages 2 à 5, La Diana, 1889.
Réparations exécutées dans l’église Notre-Dame de Montbrison – Communication de MM. Jamot, architecte, et l’abbé C. Peurière, archiprêtre, curé de Notre-Dame.
M. le Président donne lecture de la lettre suivante de M. Jamot, architecte, à laquelle est joint un relevé d’une décoration murale récemment mise au jour dans l’église Notre-Dame de Montbrison.
Monsieur le Président,
Dans le courant de l’année dernière, M. le curé de Notre-Dame de Montbrison a fait compléter la restauration du grand orgue par l’adjonction de boiseries en chêne aux deux côtés droit et gauche, pour masquer le vide sombre qui ressemblait à une entrée de cave, et aussi pour masquer la souffleterie de l’orgue.
Ces boiseries sont à charnières et peuvent être repliées sur elles-mêmes lorsque des choristes doivent exécuter des chants pour les messes en musique, etc. Elles sont dans le style du buffet de l’orgue, et surmontées d’anges aux ailes déployées destinés à donner de l’animation et une silhouette moins uniforme à la frise horizontale qui les termine. Cette adjonction au grand orgue, complément utile de sa réparation générale, avait un inconvénient pour un observateur attentif tel que M. le curé, c’était de faire ressortir davantage le défaut d’ensemble des stalles et des boiseries provisoires qui les accompagnaient tout autour du choeur, au fond duquel un autel en marbre de diverses couleurs, et dans le style du temps de Louis XIV, rendait encore plus choquantes ces irrégularités de style et d’ordonnance générale.
M. le curé a pensé, avec raison, qu’il fallait au plus tôt s’occuper de terminer la décoration d’ensemble de cette partie de l’église, qui doit, en effet, être la plus riche et la plus élégante.
Il m’a chargé en conséquence de lui soumettre un projet de boiseries de revêtement à appliquer aux pans coupés du choeur et en harmonie avec les belles stalles actuelles ; mes projet et devis ayant été acceptés, j’ai fait exécuter ces boiseries à Lyon par le maître menuisier qui a déjà exécuté le lambris sous l’orgue de Notre-Dame, la chaire et les stalles de l’église de Chandieu ; elles sont actuellement emballées, pour être expédiées à Montbrison et posées dans la quinzaine.
Pendant cet intervalle, M. le curé a fait procéder à un nettoyage général des voûtes et des murs de cette partie de l’église et enlever l’autel et les vieilles boiseries.
Cet enlèvement a mis à découvert des traces de peintures murales que M. le curé m’a prié de venir examiner.
Elles sont dans un état déplorable et il serait impossible de les restaurer.
Néanmoins je me suis appliqué à les étudier avec soin et à en faire un relevé que je vous envoie aujourd’hui, pensant que la Société de la Diana y pourra trouver quelque intérêt.
Malgré leur état de délabrement, j’ai pu reconstituer certaines formes qui m’ont paru devoir être une indication de la date de ces peintures, que j’attribue à un artiste du XIlle siècle.
Elles sont belles de composition, mais d’une naïveté d’exécution extrême, pour ne pas dire plus. Ainsi, les croix du compartiment sous la fenêtre à droite, en regardant la fenêtre du milieu, ne sont pas dessinées régulièrement ; les bras de ces croix sont inégaux ; dans la mise au net de ces peintures j’ai cherché autant que possible à reproduire tous ces défauts.
J’ai fait un calque sur place des ornements, dont j’ai pu ainsi reproduire le caractère et la silhouette ; le compartiment du milieu se compose d’une série de cercles reliés entre eux par de petites croix en ton brun rouge, d’un dessin caractéristique ; dans les intervalles sont également peintes des croix d’un beau dessin se détachant en ton or. On aperçoit encore une partie de la bordure sous la coudière de la fenêtre. Cet ensemble a été coupé par l’encastrement, fait postérieurement, de la pierre commémorative de la pose de la première pierre de l’église.
Le compartiment à droite est composé d’une série de cinq grandes croix sur la même ligne, dont les intérieurs sont enrichis de beaux dessins en forme de fleurs sortant du cercle central peint couleur or. La réunion de plusieurs croix superposées forme également un dessin de quatrefeuilles remplis d’un ton brun rouge faisant détacher les croix d’un ton bleu.
Le compartiment à gauche est formé d’une série de petits carrés de 0m 30 de côté, posés en losanges alternés, les uns par ton brun rouge pour les fonds, et les autres fonds gris bleu sur lesquels se détachent des points rouges en quinconce. J’ai cru, un moment, remarquer sur un des losanges la trace de petites fleurs de lys, jaune or, aux quatre coins ; mais il est très difficile de les distinguer, et je ne saurais affirmer l’exactitude de mon observation.
En somme, ces peintures, toutes variées de composition, devaient produire un très bel effet décoratif, lorsqu’elles avaient l’éclat des couleurs vives ; mais, ainsi que je vous l’indiquais en commençant, par suite des remaniements successifs qu’a subis le sanctuaire de l’église Notre-Dame, elles sont aujourd’hui dans un tel état de délabrement, qu’il serait impossible de les restaurer; car ce n’est que dans certaines parties, heureusement moins détériorées, que j’ai pu les reconstituer dans mon dessin. Le mieux était donc de n’y pas toucher. Et, quand les boiseries nouvelles les recouvriront, le peu qui en reste sera à l’abri d’une destruction totale.
Il était bon que la Société de la Diana, qui s’intéresse si vivement aux monuments du Forez, eût connaissance de ces débris de peintures ; c’est pourquoi je m’empresse de vous adresser le relevé que j’en ai fait, pour que vous puissiez le communiquer à la réunion du 17 janvier courant.
Veuillez agréer, etc,
Lyon, le 16 janvier 1889.
A la suite de cette lecture, M. l’abbé Peurière dit qu’il a remarqué lui-même que l’inscription commémorative de la pose de la première pierre de l’église Notre-Dame, inscription publiée dans La Mure-Chantelauze, t. 1, page 223, a été encastrée après coup dans le fond de l’abside. L’autel placé au-devant et récemment démoli était sans valeur. Il datait du commencement de ce siècle et avait été revêtu de plaques de marbres de couleur de provenances diverses.
M. le curé ajoute qu’il a fait enlever en ces derniers temps les débris de toute nature qui encombraient les reins des voûtes de son église. Depuis des siècles les matériaux les plus divers s’étaient accumulés dans les combles et jamais rien n’en avait été descendu. Ce travail de déblaiement a produit le chiffre invraisemblable de 400 tombereaux d’environ 14 quintaux métriques chacun, soit un poids de plus de 550 tonnes dont on a soulagé les voûtes et les contreforts.
M. le Président remercie M. le curé Peurière et M. Jamot des renseignements qu’ils ont bien voulu fournir à la Société sur les réparations en cours d’exécution ou projetées dans l’église Notre-Dame.
Dons.
M. Vincent Durand dépose sur le bureau, de la part de MM. les abbés Rivalland et Flachard, deux ouvrages dont ils sont les auteurs et consacrés l’un et l’autre à saint Domnin, dont les reliques ont été vénérées jusqu’à la Révolution dans l’église de Chandieu.
Des remerciements leur sont votés par la Société.