BD, Tome VI, L’ancienne paroisse et l’église de Saint-Paul d’Uzore. – Communication de M. Alphonse de Saint-Pulgent., pages 253 à 271, La Diana, 1892.
L’ancienne paroisse et l’église de Saint-Paul d’Uzore. – Communication de M. Alphonse de Saint-Pulgent.
M. de Saint-Pulgent conserve la parole pour faire la communication suivante.
La découverte et l’exploration des ruines romaines ensevelies sous la vieille église de Saint-Paul d’Uzore ont été pour moi l’occasion d’étudier cet édifice et de faire quelques recherches sur la paroisse, supprimée depuis un siècle, dont il était le chef-lieu. Je me bornerai à donner sur l’une quelques renseignements sommaires et m’appesantirai davantage sur l’autre, dont la chute n’est qu’une question de temps. Il m’a paru intéressant, avant sa disparition complète, d’en conserver au moins le souvenir par un plan, des vues, et une description détaillée.
La paroisse et ses seigneurs. – La commune de St-Paul d’Uzore (1) réunie à celle de Chalain d’Uzore
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(1) Le nom d’Uzore, anciennement Isoure, puis Uxore, étendu à toute la paroisse, semble ne s’être appliqué primitivement qu’à une portion de territoire, dont il est fait plusieurs fois mention dans le cartulaire de Savigny au Xe siècle sans indication de limites, mais que certains textes postérieurs (terrier du prieuré de Marcilly, 1477; terrier de la châtellenie de Marcilly, 1404 ; terrier de Chalain, 1524) peuvent permettre de déterminer à peu près exactement. Ce devait être la région comprise entre les étangs du Roi, le versant oriental du mont d’Uzore et le versant septentrional du contrefort désigné dans les anciens titres sous le nom de Puy du Poyet.
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pour le spirituel, formait autrefois une paroisse indépendante, dont les limites et contins étaient les mêmes que ceux de la commune actuelle et dont la population, composée surtout de paysans, était pauvre et peu nombreuse (1).
La paroisse, au moins pour partie, semble avoir originairement dépendu de la châtellenie comtale de Marcilly ; elle passa plus tard dans celle de Montbrison (2).
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(1) Le Pouillé du diocèse de Lyon en 1743 donne le chiffre de 50 communiants, l’Almanach de Lyon pour 1760 celui de 80. L’abbé d’Expilly dans son Dictionnaire géographique des Gaules (en 1766) nous apprend que la paroisse comprenait 23 feux, et Duplessy en 1806 dit que la commune renfermait 119 habitants.
(2) Terrier Granjon de Bonlieu, 1488. Réponse de Mathieu Ruil du Poyet (aujourd’hui la Grange Brûlée) parochie sancti Pauli d’Yzore, nunc vero mandamenti Montisbrisonis.Il reconnaît devoir tres rasos avene ad mensuram Marcilliaci castri, quia antiquo tempore erat de mandamento Marcilliaci castri. Ce changement de ressort eut peut‑être lieu en 1441, époque à laquelle le mandement de Montbrison fut augmenté de 50 feux. V. La Mure-Chantelauze, t. II p. 182. (Communication de M. V. Durand)
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Le prieur de Montverdun comptait à Saint-Paul un certain nombre de tenanciers et possédait de son côté sur eux un droit de juridiction réduit probablement à la basse justice et que deux chartes des années 1233 et 1258 disent, sans en préciser autrement l’étendue, être pareil à celui dont le prieur jouissait à la Bolène. Comme à la Bolène encore, les hommes du prieuré à Saint-Paul ne devaient au comte, ni taille ni chevauchée (1).
Les seigneurs de Chalain d’Uzore, les Lévis, les Luzy-Pélissac, ont possédé la seigneurie de Saint-Paul et y avaient aussi des droits de justice (2).
La Révolution érigea la paroisse de Saint-Paul en commune dépendant du district de Montbrison. Ce fut même dans le presbytère, à défaut de mairie, que la nouvelle municipalité tint ses premières séances. Le premier maire fut M. Challaye.
De 1793 à 1794 la commune de Saint-Paul d’Uzore fut rattachée au district de Boën ; pendant la même période de temps, le mot saint fut naturellement retranché de sa dénomination.
La cure et les curés – La nomination du curé de Saint-Paul appartint au prieur de Montverdun jusques au XVIll e Siècle, époque où ce prieuré ayant été réuni au séminaire Saint-Charles de Lyon, la collation appartint à ce dernier.
Les revenus du curé étaient forcément minimes dans une paroisse aussi modeste. Au XVIll e siècle, il avait la portion congrue (3) ; au siècle précédent, le revenu de la cure consistait en dix sestiers de blé, deux poinçons de vin, et un petit pré produisant deux chars de foin. Le curé jouissait en outre d’un jardin de 280 mètres carrés, contigu au presbytère (4).
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(1) Huillard-Bréholles, Titres de la maison ducale de Bourbon, n° 166 et 359. — De Charpin Feugerolles, Cartulaire des Francs Fiefs du Forez, p. 61 et 153.
(2) Almanachs du Lyonnais.
(3) Pouillé du diocèse de Lyon, 1743-1789.
(4) La cure était située au centre du bourg sur la droite du chemin allant de Saint-Paul à Chalain d’Uzore. La maison, pourvue d’un puits encore existant, est occupée aujourd’hui par le ménage Vincent et ne présente aucune particularité.
Le curé avait aussi certaines charges à acquitter. Au XIII e siècle, il devait payer à l’archevêque de Lyon 3 sols 13 d. ob. pour droits de parée, cens et concens; au XV e siècle, 16 sols pour droits de procuration, plus 4 livres pour droits de cire et d’encens. Or plusieurs paroisses qui ne semblent pas plus importantes (Andrézieu, Essertines, Saint-Cyprien) étaient moins imposées (Pouillés du diocèse de Lyon, publiés par Aug. Bernard). Ajoutons enfin que la paroisse de Saint-Paul était une de celles où les Cordeliers de Montbrison avaient le droit d’aller quêter des andouilles (Broutin, Histoire des Couvents de Montbrison, t. I, p. 216).
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Cependant, malgré son peu d’importance, la paroisse paraît avoir eu, au moins à une certaine époque, un vicaire : j’ai en effet entre mains un titre du 11 septembre 1553, relatant la vente d’un pré de deux sétives situé dans la paroisse de Saint-Paul d’Uzore, passée par sieur Etienne Goutte, vicaire de Saint-Paul d’Uzore, au profit de Mre Louis Papon, chanoine à Montbrison.
La nomenclature des curés qui se sont succédé dans cette petite paroisse jusques à la Révolution aurait présenté un certain intérêt. Malheureusement, antérieurement au XVIll e siècle, les documents permettant de dresser cette liste font défaut, et je n’ai pu relever que six noms : ceux de Mathieu Durieux en 1401 (1), de Jean Cassa en 1404 (2), de Simon Bodiment vers 1445, de Michel Ponson vers 1508 (3), de Durand Giraud dit Essanot, prêtre de Feurs, qui en 1524 construisit la chapelle de Sainte-Ursule
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(1) Chaverondier, Inventaire des archives de la Loire, t. 11, p. 220.
(2) Bibl. de Montbrison, copie du terrier Reynaudi de Marcilly, f° 224 verso.
(3) Bibl. de Montbrison, copie des terriers de Conchis, du Puy et Vende de la commanderie de Saint‑Jean de Montbrison, f° 173 verso.
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dans l’église de Feurs (1), et, en 1662, de Claude Bernichon, dont je vous lirai dans un instant le portrait peu flatteur tracé, par Mgr Camille de Neuville.
À partir de 1710 j’ai pu reconstituer la série des curés de Saint-Paul jusques à l’époque de la Révolution, grâce aux registres paroissiaux conservés au greffé du tribunal de Montbrison. Je la transcris ici.
Mres Doyot | au mois de mars 1716 | |
Gabrion | d’avril 1716 au 9 avril 1744 (2) | |
Chazal | d’avril 1744 à novembre 1746 | |
Volsey | de novembre 1746 à fin novembre 1752 | |
Barou | de décembre 1752 à la fin de 1754 | |
Vanette | de fin 1754 à fin 1772 | |
Thevenon | de février 1773 à février 1779 | |
Coudour | de mars1779 à avril 1783 | |
Dupuy | de mai 1783 au 13 mars 1784 | |
Du mois de mars au mois d’août 1784., la paroisse demeura sans pasteur. Les curés de Mornand et de Chalain et le R. P. Marc, capucin de Roanne, furent chargés de l’intérim | ||
Fétilleux | d’août 1784 au 5 septembre 1793 (3) |
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(1) Ibid. – Feurs, par l’abbé Jean-François Duguet, curé de Feurs, p. 90.
(2) M re Noël Gabrion était prébendier de la prébende des Bônes. Il mourut le 9 avril 1744 à l’âge de 70 ans et fut enterré à Saint-Paul.
(3) M re Fétilleux mourut le 5 septembre 1793 et fut enterré à Saint-Paul.
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L’église. – De l’ancienne église de Saint-Paul, il ne reste que les quatre murs de l’ensemble et la voûte du chœur. Encore celle-ci commence-t-elle à s’effondrer en certaines parties, et le mur méridional de l’église a perdu son aplomb. Cet état de délabrement remonte à une époque déjà éloignée; car on lit dans la France par cantons et par communes par Ogier: « L’église qui était dédiée à saint Paul, est aujourd’hui abandonnée; on n’en a aucun soin; une partie de la toiture est déjà tombée, bientôt il sera impossible d’assurer sa conservation si l’on ne se hâte d’y faire quelques travaux de réparations ».
Et, plus anciennement encore, au, XVIIII siècle, Mgr Camille de Neuville, lors de sa visite pastorale, signalait tout particulièrement le mauvais état de l’église dans le procès-verbal suivant conservé aux archives de l’archevêché de Lyon et dont je dois la communication à l’obligeance de M. l’abbé Prajoux :.
Visite pastorale de Monseigneur Camille de Neufville à Saint-Paul d’Isaure, le 21 de juin 1662.
Le Saint-Sacrement est tenu en cette église paroissiale dans un petit ciboire de cuivre enfermé dans un tabernacle assez chétif ; on porte le viatique aux malades dans un ciboire d’estain (1); les fonts baptismaux et saintes huiles sont mal et salement tenus ainsi que les ornements qui sont en lambeaux, déchirés et délabrés. Il y a un reliquaire de cuivre avec quelques reliques aussi négligé que le reste.
L’église est en très mauvais état, le chœur menace ruine estant entr’ouvert et fendu ; les autels sont en mauvais état étant négligés et comme à l’abandon.
La nef est découverte et il y pleut en plusieurs endroits.
Le nombre des communiants n’est que de soixante.
Le revenu de la cure consiste en dix sestiers de blé, deux poinçons de vin et un petit pré de deux charretées de foin.
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(1) L’emploi de l’étain ou du cuivre pour les vases sacrés est une dérogation, en faveur des églises pauvres, à l’usage établi d’employer pour ceux-ci l’argent avec ou sans dorure. Cf. sur cette matière l’intéressante étude de M, Barraud dans le Bulletin monumental, 24° volume, 1858.
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La nomination dépend de nous à cause de notre prieuré de Montverdun.
Messire Claude Bernichon est curé, homme très ignorant et très négligent et très incapable de la conduite des âmes, n’ayant pas même le sens commun et estant hébété et stupide ; c’est pourquoi, après l’avoir fait interroger, nous l’avons suspendu et interdit non seulement des fonctions curiales, mais encore de l’exercice de son ordre de prêtrise jusqu’à ce que autrement fut ordonné ; et à l’égard des réparations nécessaires au chœur et des ornements pour le service de ladite paroisse nous avons (1) ………
Le procès-verbal se termine ainsi brusquement, nous laissant dans l’ignorance des mesures que l’archevêque comptait prendre pour la restauration de l’église.
Celle-ci, régulièrement orientée, est bâtie sur le versant oriental du mont d’Uzore, à 8 ou 10 mètres environ au-dessus du niveau de la plaine, sur le chemin conduisant du bourg de Saint-Paul à Chalain. Cette situation peut s’expliquer par ce fait qu’à cette hauteur on se trouvait sur un terrain parfaitement sain, et aussi par cette circonstance qu’on avait la faculté d’utiliser les fondations et les matériaux d’anciennes constructions romaines (2). Mais par suite de la pente assez rapide de la montagne et sans doute aussi des travaux de culture, les terres glissaient et menaçaient d’obstruer complètement l’entrée principale de l’église. Aussi, à une époque qu’il n’est guère possible de préciser, s’est‑on vu dans l’obligation d’élever, à 31n 50 en avant de la façade, une muraille en ligne brisée, haute de 3 mètres, pour retenir le terrain et faciliter l’accès de la grande porte. Par suite de cette particularité, l’église, vue de l’ouest, paraît absolument enterrée.
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(1) Une autre visite de l’église de Saint-Paul fut faite le 22 mai 1783, par Mre Jean-Antoine-François de Malvin de Montazet, vicaire général, aumônier du roi ; mais le procès-verbal n’en a pas été conservé aux archives de l’Archevêché.
(2) Une partie du mur méridional de l’église repose sur une muraille romaine. Mais la construction nouvelle n’ayant emprunté que les deux tiers environ de la largeur de l’ancienne, on a juxtaposé au mur romain, pour le consolider et donner au nouveau la largeur voulue, un autre mur dont l’épaisseur diminue à trois reprises depuis les fondations jusqu’au niveau supérieur du mur antique, qui se trouve ainsi appuyé sur toute sa longueur par une sorte de contrefort à triple ressaut.
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L’édifice, dont les parties les plus anciennes paraissent remonter à la fin du Xl e siècle, est construit en pierres basaltiques, sauf aux angles où l’on a employé de gros blocs taillés, en granit de Maure et provenant de bâtisses romaines (1). L’aspect général en est très simple, c’est le type des églises rurales construites à peu de frais, et, sous ce rapport, on peut relever une ressemblance assez frappante avec la nef de l’ancienne église de Grézieu-le-Fromental, démolie en 1890.
Le plan comporte une seule nef rectangulaire et un chœur de même forme, mais dont l’axe est légèrement dévié vers le sud. Les murailles ne présentent ni saillies, ni contreforts.
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(1) Le granit de Maure, commune de Marcilly-le-Pavé, est facilement reconnaissable à ses larges cristaux d’un rose un peu sombre, qui prennent une teinte éclatante sous les rayons du soleil. Par suite du nombre assez considérable de ces pierres employées dans leur construction, les murs méridionaux et orientaux de l’église Saint-Paul, vers le matin et par un beau soleil, présentent à l’œil un cachet tout particulier. On voit sur plusieurs de ces pierres des trous destinés i recevoir des crampons de fer ou de bronze.
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La façade en soir est surmontée d’un campanile à ressauts multiples et percé de deux baies dont les cintres non extradossés reposent sur impostes et sur un trumeau central, sorte de dalle posée de champ, aux angles abattus en chanfrein sauf à la base et au sommet. L’espace laissé vide entre les arcs des deux faces est rempli par des tuiles anciennes et modernes posées sans mortier. Ce campanile paraît avoir été construit ou tout au moins fortement remanié au XVII e siècle.
Le portail principal primitif, dont on aperçoit encore, les arrachements, était cintré. Au XVIe siècle il a été remplacé par un portail ogival, de 1 m 60 de largeur sur 3 m 50 de hauteur, orné d’un tore caréné d’un dessin très ferme. Ce portail, dont la simplicité n’est pas dépourvue de grâce, s’ouvre un peu à gauche de l’axe de la façade. À la retombée de l’archivolte du côté droit, on remarque un corbeau figurant une tête humaine.
Une deuxième porte, de l’époque romane, donne accès dans l’église par la façade méridionale. La forme en est très simple, mais les proportions en sont bonnes. Les claveaux du cintre surhaussé qui la couronne sont en pierre très bien taillée et parfaitement appareillée. Le tympan, ajouré à l’origine, a été postérieurement rempli par de la maçonnerie. Cette porte mesure 0 m 98 d’ouverture sur 3 m 15 de hauteur à la clef du cintre, et 2 m 75 au rebord inférieur du linteau.
Des galinières précédaient autrefois ces deux portes. L’une et l’autre avaient une toiture à double pente. Celle de la grande porte avait 5 m 15 de largeur sur façade, elle protégeait à droite et à gauche du portail, à deux mètres au‑dessus du sol deux blasons dont les couleurs sont malheureusement trop altérées, pour qu’il soit possible de les reconstituer, mais qui nous ont paru, d’après ce qui en subsiste, appartenir à des personnages différents.
La galinière de la petite porte mesurait 3 m 38 sur façade, et abritait aussi deux blasons peints, mais complètement frustes actuellement (1).
Avant de quitter l’extérieur de l’église, mentionnons une litre de couleur sombre, large de 0 m 35 centimètres, qui court à 2 m 75 au-dessus du sol le long des murailles sud et est du chœur. Du côté oriental on distingue quelques ornements en diagonale et un écusson peint à cru sur le mur au dessus du crépi de la litre. Les couleurs en sont malheureusement très altérées; on distingue seulement un fond de gueules et le sommet d’un chevron d’or.
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(1) Peut-être faudrait-il voir dans un de ces blasons celui des Lévis-Couzan seigneurs de la paroisse. Nous avons en effet découvert, au-dessus et hors de la portée de la main, un écusson ogival aux armes de cette famille, gravé à la pointe sur le crépi du mur et qui a peut-être servi de modèle à l’ouvrier chargé de la peinture du blason.
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L’écusson est ovale, surmonté d’une couronne de comte et paraît remonter au XVIl e siècle (1).
Pénétrons à l’intérieur. La nef de l’église est un rectangle irrégulier mesurant 9 m 20 de longueur du côté du nord et 8 m 90 du côté du midi. Sa largeur est de 5 m 45 au fond, et 5 m 80 à l’entrée du chœur. Elle n’était pas voûtée, mais simplement couverte par un plafond horizontal ou même, à l’origine, par une charpente apparente.
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(1) Les Luzy, seigneurs de Saint-Paul, portaient de gueules au chevron d’argent accompagné de trois étoiles d’or. Le blason en question serait-il le leur ? et faut-il voir dans la différence de couleur du chevron une erreur du peintre ? Je me borne à poser la question. Un autre blason, ogival, mais qui n’est chargé d’aucune pièce héraldique, est aussi gravé sur une pierre d’appareil au haut du mur sud, vers l’angle sud-est de la nef.
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Une tribune occupant toute la largeur de l’église avait été établie, sans doute à la fin du XVIl e siècle Ou au commencement du XVIII e, au-dessus du grand portail. Elle reposait sur des pièces de bois engagées dans les murs latéraux et on devait y accéder par un escalier appliqué à la muraille septentrionale de l’édifice.
Au-dessus de cette tribune et vers l’angle nord-ouest de l’église, se trouvaient les fonts baptismaux. Leur emplacement paraît du moins déterminé par l’existence d’une peinture murale en bistre, datant de la fin du XVIl e siècle, et représentant aux deux tiers de grandeur naturelle le baptême de Jésus-Christ..
La nef ne recevait primitivement le jour que du côté du midi, par deux petites fenêtres qui ne sont pas la partie la moins curieuse du monument. Percées en forme de meurtrières dans la partie supérieure du mur, à droite et à gauche de la petite porte, ces ouvertures ont leur archivolte en plein cintre monolithe à l’extérieur et formée à l’intérieur de claveaux de granit extradossés; elles mesurent extérieurement 0 m 14 de largeur seulement sui, 0 m 65 de hauteur et présentent à l’intérieur un ébrasement de 0 m 60. Elles n’avaient point de vitrages. Les exemples de ces dispositions sont assez rares dans notre région (1).
A une époque relativement moderne, on ajouta du même côté une troisième ouverture plus grande. Cette fenêtre, malencontreusement percée près de l’angle sud-est de la nef et bâtie en retraite sur le mur, est d’un assez mauvais goût. C’est une ogive dont les claveaux sont mal taillés et non moins mal assemblés, et dont le profil extérieur forme deux cavets à peine accusés.
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(1) L’église de Clépé possède des fenêtres semblables, murées aujourd’hui et placées de même à une grande hauteur.
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Le chœur, rectangulaire aussi, mesure 5 m 45 de profondeur sur 3 m 60 de largeur. Il est éclairé près de l’angle sud-est par une jolie fenêtre cintrée, à ébrasement extérieur creusé en cavet très prononcé (1).
La voûte, en partie effondrée, est bâtie en petites briques (0 m 22 de longueur sur 0 m 11 de largeur et 0 m 03 d’épaisseur) avec écoinçons et clefs des reins en pierre. Elle repose sur des arcs d’ogive au profil en carène à arête mousse qui retombent eux-mêmes, au fond du chœur, sur des consoles en pierre d’un travail assez grossier, figurant des têtes humaines, et, à hauteur de l’arc triomphal, sur deux sortes d’impostes en pierre portant en saillie des blasons écartelés, sans émaux ni figures (2).
L’arc triomphal actuel est à angles rabattus. il a remplacé un ancien arc roman, dont une partie des matériaux est visible dans la maçonnerie qui le surmonte. Celle-ci est construite d’ailleurs d’une manière déplorable et sans nul souci des lois de la statique.
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(1) Cette ouverture a dû remplacer une ancienne fenêtre romane dont nous avons retrouvé dans le cimetière le cintre monolithe. C’est un gros bloc de granit ébrasé à l’intérieur et dont la face extérieure porte plusieurs rainures taillées au ciseau, se dirigeant du centre à la circonférence, et destinées à simuler les joints de plusieurs claveaux.
(2) Ces écussons étaient peut-être destinés à recevoir les armes peintes des Lévis-Cousan, qui portaient écartelé de Lévis et de Damas.
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Coupe de l’arc doubleau, profil et style des moulures et de la voûte, forme de la fenêtre latérale, tout se réunit pour accuser la fin du XVI e siècle ; mais les travaux exécutés à cette époque durent se borner à la réfection des parties, qui viennent d’être indiquées. Le gros œuvre du chœur est ancien et contemporain probablement de la nef. C’est ce qu’il est facile de reconnaître en examinant à l’extérieur, cette partie de l’édifice ; les gros matériaux antiques y apparaissent dans les soubassements et dans les angles, employés de la même manière que dans la nef, et ils ne semblent pas avoir été remaniés. La forme rectangulaire du chevet ne saurait être un argument contre son attribution à l’époque romane : bien qu’assez rare en Forez, on sait que cette forme se retrouve dans des églises fort anciennes.
La paroisse était peu importante et pauvre ; une reconstruction entièrement nouvelle était une grosse affaire de temps et d’argent ; et l’on a dû, à l’époque où des réparations s’imposaient, utiliser en grande partie les anciens murs et les fondations primitives.
Une porte basse pratiquée dans la muraille nord du chœur conduit à la sacristie. C’est une petite pièce rectangulaire, peu élevée, mesurant 2 m 70 sur 2 m 15. Elle était voûtée d’arêtes en pierre, comme on pouvait s’en rendre compte il y a quelques années encore avant l’effondrement de la toiture, et recevait le jour en orient par une fenêtre cintrée à ébrasement concave. On aperçoit sur ses murs des traces de peinture, où le rouge domine.
L’église elle-même était intérieurement décorée de peintures faites et refaites à plusieurs époques. D’après certains vestiges encore visibles sur quelques claveaux de l’arc de l’ancien chœur, celui-ci et la nef ont dû primitivement porter des peintures rouges, jaunes et noires, imitant des pierres d’appareil. Puis, vers la fin du XVI e siècle ou au commencement du XVIle, elles furent remplacées par des nouvelles, à en juger par des restes de chutes de fleurs et de feuillages de laurier qui ornent la nef, l’arc triomphal et le retour intérieur du grand portail. Enfin, peut-être au commencement du XVIII e siècle, des peintures à couleurs vives, semées de fleurs et de feuillages, remplacèrent définitivement les ornementations antérieures.
Deux grandes figures étaient peintes sur le mur du chevet à droite et à gauche du maître-autel. Malheureusement, on ne peut déterminer les saints ainsi représentés, car seule la partie inférieure de leurs vêtements, d’une teinte bleue foncée, a résisté aux ravages du temps. J’ai déjà signalé la peinture qui surmontait probablement les fonts baptismaux.
Une armoire ou crédence, destinée à recevoir des objets du culte et fermée par une grille, était percée dans le mur méridional du chœur.
Le sol de l’église était carrelé. Des fouilles nous ont même permis de constater, par l’existence de deux couches de béton distinctes, qu’il y avait eu deux carrelages faits à époques différentes. Les briques employées étaient des carreaux en terre rouge d’une assez mauvaise fabrication, carrée et de grandeurs inégales (1). Le chœur était peut-être pavé en carreaux d’une autre forme ; car les fouilles qui y ont été exécutées ont mis à Jour un brique hexagone semblable à celles du chœur de Chalain.
L’autel majeur de l’église était adossé à la muraille orientale du chœur. Sa belle table à rebords, en granit, gît à terre. Elle mesure 1 m 66 de longueur sur 1 m 06 de largeur et 0 m 19 d’épaisseur. L’encadrement supérieur se compose d’une plate-bande extérieure et de trois baguettes juxtaposées à section triangulaire et de faible saillie.
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(1) Les plus grands, encore en place sur une certaine étendue le long des murs latéraux de la nef, mesurent 0 m 31 de côté sur 0 m 04 d’épaisseur; les plus petits 0 m 23 de côté sur 0 m 03 d’épaisseur.
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Une autre table du même genre, à triple baguette, mais de dimensions moindres (1 m 40 sur 0 m 91), a été découverte à 0 m 18 centimètres sous le seuil actuel de la porte latérale (1).
Deux autels, sans cachet aucun, étaient appliqués au mur oriental de la nef, de part et d’autre de l’arc triomphal.
La cloche de l’église, qui devait être fort petite, si on en juge par les dimensions du campanile, aurait été, d’après la tradition, transportée après la Révolution à Montverdun et de là en l’église de Chalain d’Uzore où elle devait servir de timbre à l’horloge. Mais une visite au clocher de cette église nous a permis de constater que, si la cloche de Saint-Paul y a jamais été placée, elle n’y est plus.
Le cimetière de la paroisse s’étendait autour de l’église, mais principalement au sud. Les fouilles qui y ont été pratiquées ont mis à jour huit à dix tombes en dalles brutes dune ou plusieurs pièces, sans couvercles. L’une d’elles avait en guise de dalle de fond un lit de tuiles à rebords renversées et alternées. La longueur de ces tombes varie de 1 m 80 à 1 m 90. Nous n’y avons trouvé que quelques rares fragments de vases rouge-orange en terre fine, des débris de poterie noire grossière, trois bagues de cuivre, de la tuile à rebords (2).
Le plus grand nombre des cercueils étaient en bois; nous avons en effet trouvé une quantité considérable de clous ayant servi à en assujettir les planches.
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(1) Sur les tables d’autels à rebords consulter la notice de M. V. Durand dans le Congrès archéologique de France, LIII esession.
(2) La disposition et la forme de ces tombes (d d d du plan) offrent une analogie frappante avec celles des tombes découvertes dans le cimetière de Saint-Clément à Montverdun et signalées par M. V. Durand (Bulletin de la Diana, t. III, p. 106).
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L’intérieur de l’église renfermait aussi des sépultures, dont trois, remontant à une époque assez reculée, Méritent une mention spéciale. Ce sont des sarcophages monolithes en grès, orientés (1), semblables à ceux trouvés en 1885 dans le cimetière de Saint-Clément, commune de Montverdun, et enfouis à 1 m 40 dans le sol. Ils sont de forme quadrangulaire extérieurement et intérieurement, présentent un rétrécissement notable aux pieds, et leurs parois latérales sont évasées. Un seul a pu être retiré intact. Les parois en sont taillées à la broche en arêtes de poisson et il présente les dimensions suivantes: longueur 1 m 97; largeur à la tète 0 m 73; aux pieds 0 m 36; le tout extérieurement; creux à la tête 0 m 44 ; aux pieds 0 m 28; épaisseur des parois 0 m 075. Ce sont sensiblement les mêmes dimensions que celles des sarcophages de Saint-Clément et de Saint-Germain-Laval (2). Les couvercles ont disparu ; un cercueil pourtant possédait encore un fragment du sien ; c’est un bloc monolithe bombé qui le recouvrait sur le tiers de sa longueur. Une seule de ces sépultures renfermait des ossements intacts. Nous avons trouvé aussi des débris de poterie grossière en assez grand nombre, et quelques lambeaux d’étoffe de couleur grise.
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(1) a a a du plan.
(2) Bulletin de la Diana , t. III, p. 96 et 106.
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Des anciens objets du culte, il n’est rien resté. Je dois cependant signaler deux découvertes qui s’y rapportent certainement. Au devant de l’église, nous avons trouvé à une faible profondeur, sous terre, un fragment de petite statuette en terre cuite, représentant la partie inférieure d’un vêtement. Le travail en est assez élégant, et la disposition des draperies accuse le XVIe siècle.
Du mur de l’ancien jardin curial, où ils faisaient corps avec la maçonnerie, nous avons extrait deux tronçons d’une statuette de saint en grès oolithique du Jura, mesurant en hauteur totale 0 m 365. La tête et les bras manquent; il est difficile de mettre un nom sur le personnage figuré. Son bras droit supporte un livre ouvert et sa main gauche devait être appuyée sur un instrument, épée ou crosse, dont la partie inférieure se perd dans les plis du vêtement. Le travail de cette sculpture, qui paraît remonter au XV e siècle, est assez bon.
Ogier, dans l’ouvrage précédemment cité, parle des ruines d’un autre monument religieux qui aurait existé dans la paroisse de Saint-Paul d’Uzore.
« Ce sont celles, dit-il, d’une ancienne chapelle d’un fort joli style byzantin; elle a encore son campanile et l’intérieur était couvert de fresques «.
Je ne sais ou l’auteur a puisé ce renseignement. Il y avait bien autrefois sur la crête du mont d’Uzore, entre la paroisse de Saint-Paul et celle de Chalain, une chapelle dédiée à Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, dont la présence, dit-on, protégeait contre la grêle le domaine des Rouzières situé non loin de là dans la plaine. Cet édifice est actuellement rasé jusqu’aux fondations, mais il subsistait encore an commencement du siècle et, d’après les indications que j’ai pu recueillir dans le pays, il n’aurait rien eu de byzantin et se serait composé simplement de deux pièces rectangulaires. Je crois donc que le signalement d’Ogier ne peut se rapporter à ce petit monument et comme, près du village de Saint-Paul, on ne trouve point d’autres vestiges d’édifice religieux, on peut admettre, jusqu’à plus ample informé, qu’il y a eu de sa part erreur et qu’il a fait deux monuments d’un seul.
Je ne puis terminer cette monographie sans remercier M. Rochigneux de son concours empressé aussi bien dans l’étude de l’église de Saint-Paul que dans la recherche des substructions antiques. Son activité et sa science, qui n’ont d’égales que sa modestie, m’ont évité beaucoup de travail et de temps perdu et, si les notes que je vous ai lues ont su présenter pour vous quelque intérêt, c’est en grande partie à votre bibliothécaire que je suis redevable de cette bonne fortune.