UNE TOMBE A INCINÉRATION DU IIe SIÈCLE DE NOTRE ÈRE DÉCOUVERTE AU HAUT-DU-NOTIN A SAINT-SIXTECommunication de Mme Sidonie Bündgen, BD, Tome LXV, Montbrison, 2006, pages 221 à242.
C’est en 1884 qu’ont lieu les premières découvertes à Saint-Sixte, sur le Haut du Notin . Un trésor de vaisselle en bronze argenté rassemblé dans un chaudron et dont certaines pièces portent le nom de leur propriétaire, Sextus Julius Basilius, est mis au jour lors de travaux agricoles. Ce dépôt est daté du IIIe siècle de notre ère. En 1991, en bordure d’une parcelle voisine, une tombe à incinération, large tache ovale, charbonneuse et riche en mobilier archéologique, est découverte lors d’un labour. Son matériel, soigneusement recueilli et conservé par ses inventeurs, particulièrement par Monsieur Jean Grenier, sera présenté ici. C’est en 2000, lors de prospections sur la commune dans le cadre d’une thèse à l’Université de Franche-Comté ayant pour sujet le versant oriental du Forez (Loire) du Paléolithique au haut Moyen-âge, que ce mobilier m’a été confié. L’un des intérêts majeurs de cette fosse est de livrer un ensemble d’objets enfouis simultanément qui fournissent des repères typologiques et chronologiques primordiaux pour l’étude du mobilier archéologique des Monts du Forez.
DESCRIPTION DE LA FOSSE :
La structure, large tache noire en surface, avait des parois obliques et un fond arrondi, ce qui lui donnait un aspect conique. Sa profondeur totale, depuis le sommet de la terre végétale, était de 70 cm environ et son diamètre variait entre un mètre en surface et 80 cm à la base. Aucune trace de rubéfaction n’a été remarquée lors de la fouille, ni sur les parois, ni sur le fond. Le sédiment était de couleur grise, sa texture cendreuse et sableuse. Il contenait de nombreux fragments de charbon et des esquilles d’os calcinées dont la taille moyenne n’atteignait pas le centimètre. Deux personnes se sont chargées de recueillir le matériel, sans faire de relevé, mais il est certain que l’ensemble des vases était fracturé et leurs tessons mêlés les uns aux autres pêle-mêle. Il n’a pas semblé aux fouilleurs qu’un des vases ait pu servir d’urne funéraire car tous étaient fragmentés et au moins partiellement brûlés.
LE CONTENU DE LA STRUCTURE :
La fosse contenait le nombre impressionnant de 1150 tessons. Une fois les collages réalisés, 55 individus ont été dénombrés, dont 18 vases en terre sigillée, 1 en céramique peinte, 3 en céramique claire micacée, 5 en céramique à parois fines, 1 en céramique grise fine, 14 en céramique commune cuite en mode A, 6 en céramique à pâte claire, 7 en céramique commune cuite en mode B. Il faut signaler que le classement dans ces différentes catégories reste assez aléatoire en ce qui concerne les pâtes claires et les pâtes grises du fait que la grande majorité des fragments est brûlée et a subi une forte altération, notamment de la couleur. Il ressort que les 55 individus sont des offrandes primaires qui ont accompagné le défunt sur le bûcher. L’abondance des tessons et le nombre d’individus qui, après collage, sont des formes archéologiquement complètes, indiquent que ce matériel a été soigneusement récolté sur le bûcher après la crémation.
LA CÉRAMIQUE, UNE SÉRIE DE SERVICES :
En raison des fortes transformations que les vases ont subies lors de leur crémation, aucune recherche de provenance des pâtes n’a pu être faite. Les fourchettes chronologiques proposées seront donc assez larges. Tant pour la terre sigillée que pour les productions locales, la céramique se caractérise par la présence de plusieurs services, qui sont des associations de vases de même morphologie mais de taille et de destination différentes . Ces séries sont courantes dans le mobilier funéraire gallo-romain, aussi bien en position primaire que secondaire.
POUR UNE TABLE BIEN DRESSÉE : LES SERVICES EN TERRE SIGILLÉE :
On ne compte pas moins de trois services pour la terre sigillée du Haut-du-Notin. Ces services sont une création flavienne des ateliers de la Graufesenque, mais ils ont connu un réel succès et ont rapidement été produits en Gaule du centre. Le service A est représenté par quatre coupelles Drag.35 dont une seule porte sur la lèvre un décor de feuilles d’eau à la barbotine. Deux coupes Drag. 36, elles aussi sans décor, leur sont associées. Le service C se compose de deux coupes Drag. 46, dont aucune n’est complète, et d’une assiette Curle 15 qui porte sur l’intérieur de son fond un double cercle estampillé. Le service F comprend quatre assiettes Curle 23 dont deux ne portent aucune marque, une est estampée par une rosette sur l’intérieur et la dernière par une rosette interne et un sillon externe.
Les coupes Drag 27 n’appartiennent pas à un service tel que défini précédemment, mais on en dénombre trois dans notre ensemble. L’une d’elles porte en guise d’estampille un simple cercle tracé à main levée . Enfin, on trouve un exemplaire unique d’assiette Drag.31 portant un sillon sur chaque face de son fond. Une seule forme n’a pas été identifiée. Il s’agit d’une coupe ou d’une assiette à lèvre en bourrelet et panse arrondie. Le fond est inconnu. Une bande d’incisions verticales orne le milieu de la panse.
Chronologiquement, c’est un ensemble assez homogène dont les phases de production s’étalent du début du Ier siècle au début du IIIe, mais qui se situe en moyenne entre la fin du Ier siècle et la fin du IIe.
LES OBJETS DE LA BOISSON :
Il y a six gobelets. Le premier est de type Lezoux A4. On peut rapprocher le second, bien que très incomplet, du type Mayet XXI n°196. Le troisième, qui porte un décor incisé vertical, n’est pas sans rappeler les gobelets en terre sigillée de type Déchelette 72, mais la pâte et le revêtement de notre individu indiquent clairement qu’il ne peut s’agir que d’une imitation. Le quatrième, dont nous ne possédons qu’une lèvre en amande et une épaule marquée, est indéterminé. Il ne reste du cinquième qu’un fragment de panse ornée d’un décor poinçonné. Sa forme est proche de celle d’un gobelet roannais illustré dans l’ouvrage de Martine Genin et Marie-Odile Lavendhomme . Ces cinq éléments sont tous en céramique à parois fines. En revanche, le sixième vase possède une pâte grise fine. Il s’apparente à une production bien attestée à Roanne dans les horizons tardifs sous l’appellation de “pot ovoïde à panse ondulée” .
Les cruches sont, elles aussi, au nombre de six. Deux exemplaires ont un large col et une lèvre évasée ; un autre a un bord haut, évasé et mouluré et un quatrième possède un bord en double bandeau qui trouve des équivalents dans les derniers horizons roannais . Des deux derniers éléments nous ne possédons pas les lèvres mais seulement le fond, plat, et le col, haut et resserré, qui est relié à la panse globulaire par deux anses cannelées. Ce sont des cruches de grand module, proches des amphorettes, qui rappellent certains exemplaires roannais du début du IIe siècle . Dans la nécropole roannaise, de telles cruches ont été trouvées décapitées et servant de couverture aux urnes contenant les cendres des défunts . Elles ne sont pas brûlées, ce qui n’est pas le cas de nos exemplaires qui sont, de surcroît, entièrement fracturés. Dans leur cas, la décapitation rituelle n’est pas impossible puisque leur goulot est brisé et n’a pas été retrouvé dans la fosse.
CONSOMMER DES ALIMENTS LIQUIDES OU SOLIDES :
On trouve cinq coupes à bandeau et une variante à la lèvre moulurée et dont le bas du bandeau est recourbé et fortement mouluré. Toutes ont le même module, leur diamètre s’échelonnant de 10 à 12 cm. Il y a de nombreuses variantes de cette forme. On en connaît des exemplaires à Lyon, à Roanne, à Lezoux et jusqu’à Soleure . Les bols sont représentés par un individu peint du type Périchon 16. Il porte encore quelques traces de peinture brune et blanche. Les assiettes à bord arrondi plus ou moins rentrant et à fond plat sont fortes de six individus dont le diamètre se situe en moyenne aux alentours de 11 cm, tandis que deux plats du même type ont un diamètre d’environ 15 cm. L’un d’eux a la lèvre moulurée et trois petits pieds coniques. Ce type de vaisselle est fréquent dans les derniers horizons roannais.
APPRÊTER ET CONSERVER DES ALIMENTS :
On dénombre deux marmites à la lèvre en poulie, de petite taille (diamètre compris entre 12 et 14 cm) et toutes deux cuites en mode A. Leur format et leur mode de cuisson indiquent qu’il s’agit vraisemblablement d’objets symboliques qui n’ont jamais été destinés à être utilisés. Parmi les pots, deux sont ansés et leur pâte est micacée. L’un d’eux à la particularité d’avoir une panse à cinq pans coupés. Deux autres sont des pots carénés. L’un porte un revêtement micacé. Les deux derniers exemplaires, en céramique commune, ne sont connus que par leur panse refermée et dissymétrique ornée d’une large bande de guillochis plus ou moins réguliers.
LES AUTRES MATÉRIAUX : LE VERRE :
La fosse contenait 46 fragments de verre, mais seuls deux individus ont été identifiés. En effet, le rôle d’offrandes primaires de ces récipients ne fait aucun doute du fait de la déformation de la totalité des fragments. Ils ont tous partiellement fondu ce qui rend leur identification impossible. Les formes reconnaissables sont deux bords craquelés et détériorés par le feu, dont la couleur originelle était d’un bleu très clair. L’un est à simple repli, l’autre à double repli, ce qui permet de déterminer la présence d’au moins deux individus. Il s’agit de pots ovoïdes Isings 67. On sait que cette forme a été largement produite depuis l’époque tibérienne jusqu’à la fin du IIe siècle. La présence de plusieurs récipients en verre dans une tombe à incinération est souvent considérée comme l’indice d’une certaine richesse, contrairement à la céramique, très courante et de piètre valeur marchande .
LE MÉTAL :
On a prélevé 123 fragments de clous dont 67 individus. La grande majorité de ces éléments est extrêmement détériorée car la corrosion du métal a été très forte. Cependant, quelques individus ont étonnamment bien résisté à la décomposition et conservent, parfois entièrement, une peau très lisse, grise foncée et en excellent état. Il est possible que l’action du feu sur le métal soit à l’origine de ce très bon état de conservation . Une étude systématique des 37 individus les mieux conservés, faite au binoculaire, a permis de constater que dans l’amalgame de terre et de métal aggloméré autour du corps des clous, des fragments de charbon, d’os calcinés et de fibre de bois ont été conservés. Les clous sont courants dans les incinérations gallo-romaines, ils proviennent sans doute de l’aménagement du lit funéraire et du bûcher mais aussi de coffres ou de meubles brûlés avec les défunts . Leur abondance dans la fosse met à nouveau en évidence le soin avec lequel les restes d’offrandes primaires ont été prélevés sur l’ustrinum après la crémation.
Un dernier objet en fer fait partie de ce lot de mobilier. Il s’agit d’un rivet formé d’une rondelle ajourée sur laquelle ont été greffées deux pointes. Comme pour certains clous, cet objet a bien résisté à la corrosion. Les faibles traces d’utilisation que l’on peut déceler au microscope sur les pointes indiquent soit que ce rivet a été très peu utilisé, soit qu’il a été enfoncé dans un matériau à faible résistance, comme le bois tendre ou le cuir.
LA TERRE CUITE :
Une dizaine de fragments de terre cuite très blanche mais partiellement brûlée faisaient partie du matériel de la fosse. Après remontage, il s’est avéré qu’il s’agissait de deux statuettes creuses représentant un buste féminin et un oiseau. C’est une production dont on connaît des ateliers dans l’Allier, autour de Moulins, mais aussi à Lezoux, à Autun, et, vraisemblablement, à Roanne . Ces statuettes étaient moulées en deux parties : une pour la face avant et une pour l’arrière. Leur production se divise en trois grandes catégories : les divinités, les personnages et les animaux .
Le premier de nos exemplaires représente une femme dont les épaules sont drapées de trois larges bandes de tissu aux plis bien marqués. Le visage, rond, et dont les détails sont bien visibles, est encadré par une coiffure dont seul l’avant nous est connu. Sur le front, les cheveux sont séparés en deux bandeaux ondulés qui couvrent les oreilles et semblent se rejoindre à l’arrière pour former un chignon au sommet de la tête. Le socle sur lequel la statue était posée a disparu. Il existe un exemplaire très proche dans les collections du Musée des Antiquités nationales . Les bustes féminins sont extrêmement abondants parmi les statuettes en terre cuite.
La seconde figurine représente un oiseau (tourterelle ou pigeon). Extrêmement détériorée, elle n’est connue que par son socle et des fragments d’aile et de queue horizontale. Ce type de représentation est connu parmi les statuettes recueillies à Feurs comme à Roanne.
Ces objets, produits uniquement dans le centre de la Gaule , ont connu un très large succès et une vaste diffusion. On en retrouve jusqu’en Grande-Bretagne, en Suisse, en Belgique et en Autriche . Dans la Loire, il s’en est trouvé à Ailleux, Cezay, Chalain-d’Uzore, Feurs, Roanne et Saint-Marcel-de-Félines, essentiellement dans des contextes funéraires. Les Vénus et les déesses mères sont les représentations les plus abondantes . En règle générale, ces statuettes restent encore difficilement datables. Elles étaient utilisées dans les laraires, les temples, les lieux sacrés (ex voto), les thermes et les tombes où elles accompagnaient le défunt.
DATATION ET INTERPRÉTATION :
La datation de cet ensemble est assez homogène. Malheureusement, elle s’étale sur une assez longue durée tout au long du IIe siècle de notre ère. Bien que la surcuisson des vases en terre sigillée ne nous ait pas permis d’identifier les ateliers de production, la proximité avec le centre de Lezoux permet de supposer a priori que nos exemplaires en sont issus. Quoiqu’il en soit, et quelle que soit la provenance des formes trouvées à Saint-Sixte, toutes ont été fabriquées simultanément entre le début et le milieu du IIe siècle de notre ère. Pour la céramique commune , le répertoire de référence est celui du mobilier roannais récemment publié . Les types identifiés au Haut-du-Notin sont connus à Roanne essentiellement entre le début du IIe et le début du IIIe siècle de notre ère. En superposant ces résultats, on peut affirmer que cette tombe est celle d’une personne qui a vécu entre 110-120 et 170-180 après J.-C.
Compte tenu de l’abondance du matériel contenu dans la fosse, plusieurs hypothèses peuvent être émises quant à son utilisation. En effet, après le remontage, 55 vases en céramique peuvent être dénombrés, complétés par deux récipients en verre, deux statuettes en terre cuite et des clous en abondance. L’ensemble paraît très important pour une simple tombe à incinération. Diverses interprétations sont envisageables (ustrinum, bustum…), mais l’étude du contexte de la découverte puis celle du matériel les repoussent définitivement.
En effet, les tombes à incinération sur place (bustum) sont relativement rares en Rhône-Alpes. On en connaît notamment des exemples à Montalieu-Vercieu (38), à Lyon (69) et à Saint-Paul-Trois-Châteaux(26). Elles se présentent généralement comme une fosse rectangulaire aux parois verticales et partiellement rubéfiées. De très nombreux clous, d’abondants fragments de céramique et des scories de verre composent leur mobilier. Ces éléments ont pour caractéristique de ne pas être mêlés au comblement de la tombe mais de reposer sur le fond de la structure . La forme ovale de la fosse de Saint-Sixte, sa taille, ses parois intactes et la répartition du mobilier dans son comblement sont autant d’indices pour rejeter avec certitude l’hypothèse du bustum.
L’ustrinum est le lieu où s’élève le bûcher et où se déroule la crémation. C’est là que les résidus des offrandes primaires sont recueillis, ainsi que les restes calcinés du défunt, afin d’être déposés dans la tombe prévue à cet effet. Ces aires de combustion sont totalement rubéfiées et le mobilier y est très hétérogène, composé de matériel résiduel issu de chaque cérémonie funéraire. La structure du Haut-du-Notin, par l’homogénéité de son mobilier et par l’absence de zone rubéfiée, ne correspond pas du tout à cette définition. L’hypothèse de l’ustrinum peut être définitivement écartée.
Ainsi, nous sommes bien en présence d’une fosse à incinération. Les conditions dans lesquelles s’est déroulée la fouille ne permettent pas de trancher s’il s’agit véritablement d’une tombe, contenant les restes du défunt, ou d’un dépôt funéraire, contenant les résidus d’offrandes mais peu ou pas d’os calcinés. L’ensemble des offrandes est primaire. Même si elles sont particulièrement abondantes, il est délicat de préjuger de la richesse du défunt à partir de leur seule présence. Cela d’autant plus qu’il est avéré que la céramique n’a, dans l’Antiquité, que peu de valeur marchande, surtout à proximité immédiate des centres de production. De plus, l’abondance des offrandes varie considérablement au cours de l’Antiquité en fonction de la période et des rites et habitudes funéraires. Ainsi, la présence de statuettes en terre cuite est, dans la région, l’indice d’un traditionalisme gaulois alors que, loin des centres de productions, elle peut revêtir un caractère plus luxueux. C’est pourquoi une tombe riche en matériel ne correspond pas forcément à un personnage aisé.
LA TOMBE DE SAINT-SIXTE DANS SON CONTEXTE :
Le secteur du Haut-du-Notin est connu depuis longtemps comme étant riche en vestiges archéologiques. Afin de déterminer si cette tombe était isolée ou si, au contraire, elle faisait partie d’une petite nécropole rurale, nous nous sommes penchés sur le mobilier qui a été recueilli dans les alentours. Il se compose essentiellement de céramique culinaire : des pots, des marmites, des jattes, des couvercles et de grands conteneurs. Quelques fragments de terre sigillée (Drag. 37) et de céramique peinte (Périchon 16) complètent cet ensemble. La fourchette chronologique est assez vaste. Elle couvre tout le IIe siècle de notre ère et vraisemblablement une partie du IIIe. Ces éléments semblent être issus d’un d’habitat plutôt que d’une nécropole (céramique culinaire). Ainsi aucun indice ne permet de supposer que d’autres sépultures accompagnaient la tombe de Saint-Sixte. En revanche, la présence d’un habitat plus ou moins proche est plus que probable. On peut aussi supposer le passage d’une voie de communication. Mais, comme le rappelle Laurence Brissaud dans son étude sur les nécropoles du Bas Berry “la voie joue un rôle évident de pôle attractif, mais l’implantation des tombes semble plutôt liée à la vie qui se développe de part et d’autre de ce réseau de communication. Or la condition nécessaire à l’implantation humaine et animale demeure la présence de points d’eau”. Au Haut-du-Notin, la Goutte du Moulin s’écoule à moins de 500 m du site.
Dans un secteur plus ou moins proche, plusieurs zones funéraires ont été repérées. La plus importante se trouve sur la commune d’Ailleux, au lieu-dit la Croix d’Ailleux. Cette nécropole à incinération a été partiellement fouillée par Vincent Durand en 1878 . Elle est datée du milieu du Ie siècle au début du IIIe siècle de notre ère . Elle doit probablement être associée à l’agglomération secondaire de la Croix Lugnier qui a été repérée à 300 m de là. D’autres tombes à incinérations sont connues à Ailleux : à Ruiller, deux fosses ont été fouillées par Vincent Durand . L’une d’elles contenait un bol peint au décor géométrique, l’autre une bouteille en verre et des fragments de céramique. A Domois, c’est aussi Vincent Durand qui a découvert des restes de sépultures à incinération datant probablement du Ier siècle de notre ère . Sur la commune de Cezay, au lieu-dit le Mont Joie, ce même auteur signale un “cimetière à ustion” qui a rendu de la céramique, des clous, des statuettes en terre cuite et une monnaie en bronze d’Antonin-le-Pieux . Enfin, à Saint-Martin-la-Sauveté, au Prénat, lors de la fouille d’un tronçon de voie romaine, deux tombes à incinération ont été découvertes .
Plus généralement, les nécropoles de la Loire sont assez mal connues car elles sont, pour la plupart, le fruit de découvertes anciennes. Des fouilles relativement récentes sur celle de Roanne ont permis de cerner les rituels et les habitudes funéraires ségusiaves . Durant les deux premiers siècles de notre ère, inhumations et incinérations sont pratiquées conjointement, mais les secondes sont nettement plus abondantes que les premières. Toutes les tombes à incinération sont des dépôts. Elles sont de deux types : avec ou sans urne funéraire. Les fosses sont en pleine terre, de petite taille et peu profondes. Certaines contiennent beaucoup de mobilier mais celui-ci va en se raréfiant plus on avance dans le temps. Cette spécificité n’est pas uniquement roannaise puisque la même remarque a pu être faite dans d’autres nécropoles de la région Rhône-Alpes . Bien qu’il s’agisse d’une nécropole urbaine ses incinérations sont typologiquement proches de notre structure. Celle-ci reste pourtant plus riche en mobilier funéraire que la moyenne roannaise. Peut-être faut-il voir là une particularité rurale. L’étude exhaustive et minutieuse du mobilier provenant des tombes connues dans la région de Saint-Sixte permettrait, peut-être, de déterminer un faciès propre aux structures funéraires de la campagne ségusiave.
CONCLUSION :
L’étude de cette fosse à incinération du IIe siècle de notre ère n’aurait pu se faire sans l’enthousiasme et la sagacité de M. Jean Grenier. Grâce à sa récolte minutieuse du matériel et ses observations attentives, cette structure a été prélevée dans des conditions rarement atteintes lors de découvertes fortuites. Il a, par son intérêt, sauvé d’importantes informations qui sont bien plus qu’un simple point sur les cartes de répartition.
Saluons aussi la mairie de Saint-Sixte, et plus particulièrement son maire M. Philippe Essertel. Touché par cette découverte et sensible à l’histoire de sa commune, il a jugé bon de partager cette information avec ses concitoyens. Grâce à lui, l’intégralité de la tombe du Haut du Notin est à présent exposée à la mairie.
De telles preuves de l’intérêt des particuliers et des administrations locales pour l’archéologie sont, pour le chercheur, un encouragement et une précieuse récompense.
Figure 1. Terre sigillée : services A et C.
Figure 2. Terre sigillée : service F et autres.
Figure 3. Gobelets et cruches.
Figure 4. Céramique commune : coupes, bols et assiettes.
Figure 5. Céramique commune :
Plats tripodes, marmites et pots.
Figure 6. Autres matériaux : Verre, fer, terre cuite.
Figure 7. Tableaux chronologiques du mobilier.
Durand Vincent : Trésor de Limes ; Bulletin de la Diana t.II ; 1883 ; p. 408-416
Feugère Michel : Le trésor de Chalain d’Uzore (Loire) ; Cahiers Archéologiques de la Loire n°4-5 ; 1984-1985 ; p. 68.
Vernhet Alain : Création flavienne de six services de vaisselle lisse à la Graufesenque ; Figlina 1 ; Lyon ; 1976 ; p. 13-2.
La forme de nos exemplaires, évasée, aux lobes peu marqués et à la lèvre épaisse indique une production tardive. Information orale de Marie-France Meylan-Krause
Genin Martine et Lavendhomme Marie-Odile : Rodumna (Roanne, Loire), le village gallo-romain. Evolution des mobiliers domestiques ; Documents d’archéologie française n°66 ; Paris ; 1997 ; n°2 pl.49.
Genin Martine et Lavendhomme Marie-Odile ; op. cit. ; p.13.
Par exemple le n°26 planche 103 de l’étude sur Roanne précédemment citée.
Par exemple, on peut les rapprocher des cruches de l’horizon 9 illustrées sur la planche 83 n°7 et 8 de l’ouvrage précédemment cité
Poncet Jean : La nécropole gallo-romaine de Roanne ; Cahiers archéologiques de la Loire n°1 ; 1980-1981 ; p.34
Information orale Caty Schucany.
Castella Daniel ; op. cit. ; p.69.
Delor J.-P. ; A propos des clous de cercueil gallo-romains ; Revue archéologique Sites n°10 ; 1973 ; p.25-28. L’auteur déclare avoir rencontré un phénomène semblable parmi les clous de la nécropole de Villiers-sur-Tholon : …certains d’entre eux, ayant subi l’action d’un feu violent (…), leur surface a été transformée en oxyde magnétique. Ils ont donc été protégés de la rouille ce qui nous a permis de les retrouver presque intacts avec une couleur gris noirâtre qui ferait croire qu’ils sortent de la forge.
Castella Daniel : La nécropole gallo-romaine d’Avenches – En Chaplix. Fouilles 1987-1992. Volume 1 : étude des sépultures ; Cahiers d’archéologie romande n°77, Aventicum IX ; Lausanne ; 1999 ; 47-51
Bémont Colette et alii : Les figurines en terre cuite gallo-romaines ; Documents d’archéologie française n°38 ; Paris ; 1993 ; p.61-62
Rouvier-Jeanlin Micheline : Les figurines gallo-romaines en terre cuite au Musée des Antiquités nationales ; supplément à Gallia n°24 ; Paris : CNRS, 1972
Rouvier-Jeanlin Micheline ; op. cit ; p.287 n°785
Bémont Colette et alii ; op. cit ; p. 217-253
Bémont Colette et alii ; op. cit ; p. 1991-194 et Genin Martine, Lavendhomme Marie-Odile ; op. cit ; p. 58
Moins de cinquante kilomètres à vol d’oiseau
Elle a été classée selon la nomenclature que j’ai mise en place pour l’étude du mobilier découvert au cours de mes prospections en Forez et qui sera détaillé dans mon travail de thèse
Genin Martine, Lavandhomme Marie-Odile ; op. cit
De Klijn Hans ; Le site de Chalépont à Montalieu-Vercieu (Isère). Une nécropole gallo-romaine et un habitat du haut Moyen-Age ; Revue archéologique de l’Est ; t.41 ; 1990 ; 275-288
Brissaud Laurence : Sépultures et habitats gallo-romains en Bas Berry ; in Ferdière Michel ; Monde des morts, monde des vivants en Gaule rurale (Ier s. av. J.-C. / Ve s. ap. J.-C.); Tours ; 1993 ; 260-261
Durand Vincent ; Voie romaine de Lyon à Clermont. Découverte d’un tronçon de cette voie sur les communes de Saint-Martin-la-Sauveté et de Cezay ; Bulletin de la Diana ; t. VII ; 1893 ; p.85
Bündgen Sidonie : Recherches sur l’occupation du flanc oriental des monts du Forez à l’époque antique ; mémoire de maîtrise à l’Université Lumière Lyon 2 ; 1996 ; p.49-50
Durand Vincent : Vase peint d’Ailleux; Bulletin de la Diana ; t. V ; 1890 ; p.39
Durand Vincent : Puits antique de Domois ; Bulletin de la Diana ; t. IX ; 1896 ; p.58
Durand Vincent : Du parti qu’on peut tirer des noms de lieu pour la recherche des sanctuaires du paganisme en Forez; Bulletin de la Diana ; t. VII ; 1894 ; p.347
Durand Vincent : Voie antique de Saint-Martin-la-Sauveté; Bulletin de la Diana ; t. I ; 1876-1881 ; p.56.
Vaginay Michel : Nécropoles gauloises ou gallo-romaines du département de la Loire ; in : Nécropoles à incinération du Haut-Empire. Table ronde de Lyon. 30-31 mai 1986 ; Rapports archéologiques préliminaires de la région Rhône-Alpes ; Lyon ; 1987 ; 109-114
Ferdière Michel ; op. cit ; p.441
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