ANNEE 1893

______

BULLETIN DE LA DIANA

(N°7)

________

Procès-verbal de la réunion du 7 février 1893.

___

 

PRÉSIDENCE DE M. VINCENT DURAND.

La séance est ouverte à deux heures.

Sont présents : MM. A. Brassart, E. Brassart, abbé Clapet, Coudour, Dugas de la Catonnière, Dr P. Dulac, V. Durand, abbé Forestier, de Frémin­ville, Gonnard, Huguet, Jeannez, Lachmann, Lafay, E. Le Conte, Matagrin, Monery, abbé Picard, abbé Relave, Rochigneux, J. Rony, L. Rony, Rousselon, abbé Sachet, Alph. de Saint-Pulgent, Tardieu, The­venet.

MM.le comte de Poncins, Maurice de Boissieu, de Viry ont écrit pour s’excuser de ne pouvoir assister à la séance.

Mort de Son Éminence le cardinal Foulon,président d’honneur de la Diana.

M. le président s’exprime ainsi :

Il y a six ans, à pareil jour, appelé comme je le suis en ce moment à l’honneur accidentel de vous présider, j’avais la douleur de vous annoncer la mort du regretté cardinal Caverot. C’est à moi encore qu’échoit le triste devoir de rendre, en votre nom, un suprême tribut d’hommages à son successeur, Monseigneur le cardinal Foulon, archevêque de Lyon et de Vienne, président d’honneur de la Diana.

La mort de Monseigneur Foulon n’est pas seulement un deuil pour l’église de Lyon, qu’il illustrait par ses vertus et gouvernait avec tant de sagesse, pour la France, qui n’a pas oublié sa patriotique attitude devant l’invasion allemande, c’est aussi un deuil pour les lettres. Les belles-lettres, il les avait cultivées dès sa jeunesse avec amour, il les avait enseignées avec éclat, il les avait fait monter avec lui sur le siège primatial des Gaules. Nul n’ignore, et mieux que personne, messieurs du séminaire de Montbrison, vous pourriez l’attester, avec quel zèle et quel succès il s’appliquait à les faire fleurir dans le clergé de ce vaste diocèse. La Diana perd donc en lui plus qu’un protecteur éclairé et bienveillant, elle perd, j’ose le dire, un confrère qui, même dépouillé de l’éclat de la pourpre, aurait toujours brillé au premier rang.

Au culte des lettres, Monseigneur Foulon unissait l’amour des beaux-arts, leurs compagnons immortels. Les sollicitudes multiples de sa charge l’ont seules empêché sans doute d’accomplir le dessein qu’il avait conçu, — et sur ce point qu’il me soit permis d’apporter mon témoignage personnel, — de reprendre, sur des bases nouvelles et meilleures, le projet formé par son prédécesseur d’une description raisonnée des trésors de nos églises, afin d’assurer la conservation de tous les objets précieux par les souvenirs qu’ils rappellent ou par leur mérite artistique.

La Diana, frappée aujourd’hui à la tète, est cruellement éprouvée depuis une année. Dieu a rappelé à lui un nombre trop grand, hélas ! de confrères qui tous possédaient notre amitié et notre estime, et plusieurs toute notre vénération. En présence de ces tombes trop tôt refermées, quelques-unes sur des existences encore pleines de promesses, monte involontairement aux lèvres le vieil adage : Ars longa, vita brevis! Toutefois, loin de nous toute pensée de découragement! Sur le champ de bataille, si celui qui porte le drapeau succombe, le noble insi­gne est relevé par des mains vaillantes et continue d’avancer où l’appelle l’honneur. Qu’il en soit ainsi parmi nous, messieurs. Continuons de servir notre cher pays de Forez, en le faisant connaître et aimer toujours davantage : ce sera encore un hommage rendu à la mémoire de ceux qui ne sont plus, car ainsi nous suivrons leur exemple et nous nous montrerons animés de leur esprit ».

Dons.

Depuis la dernière séance, la Diana a reçu des dons nombreux et importants. Ne pouvant citer tous les donateurs, M. le Président adresse, au nom de la Société, des remerciements particuliers à M. Huguet, qui a bien voulu enrichir la bibliothèque d’une trentaine d’ouvrages sur l’histoire locale ;

A M. l’abbé Ulysse Chevalier, cet infatigable confrère chez qui on ne sait ce qu’il faut le plus admirer, ou du prodigieux labeur, ou de la sûreté et de l’étendue du savoir, pour le don de quantité de documents de premier ordre édités par ses soins ;

A M. le comte de Chabannes, pour le premier volume de l’Histoire de la maison de Chabannes;

A M. Ernest de la Bâtie, qui à ses libéralités précédentes a ajouté deux dons qui seront particulièrement précieux à la Société.

Le premier est celui d’une épée, d’un curieux travail du XVIIIe siècle, à laquelle se rattache un souvenir de famille bien respectable. C’est l’arme dont était ceint Louis-François-Germain Puy de Mussieu, son grand-père, lorsqu’il se présenta, le 8 juin 1778, à la chambre domaniale de Forez, afin de prêter, pour les fiefs qu’il tenait du roi, un hommage qui devait être le dernier.

Privé de descendants qui puissent continuer son nom, le vieux gentilhomme a désiré que cette épée fût suspendue dans le‘ musée de la Diana, pour y perpétuer le souvenir de sa maison et de l’affection profonde que lui-même porte à son pays. Il ne pouvait choisir de meilleur symbole de la droiture et de la loyauté héréditaires d’une race qui n’a jamais forligné et qui, Mêlée depuis plus de cinq siècles à l’histoire du Forez, sera longtemps représentée, il faut l’espérer, par l’homme de bien qui en soutient si dignement les traditions.

M. de la Bâtie a offert en outre à la Diana un document du plus haut intérêt : l’Inventaire général et raisonné des titres et papiers de la terre et seigneurie de la Bastie en Forez, dressé en 1782 par Benoît Méjasson, notaire royal et commissaire en droits seigneuriaux. Cet inventaire renferme l’ana­lyse d’une partie des titres de la maison d’Urfé ; de ceux de la seigneurie de Sainte-Agathe, riches en informations sur les familles chevaleresques de Barges et de Mars ; enfin de ceux de la famille Puy de Mussieu de la Bâtie. On y trouve aussi d’excellents renseignements sur diverses prébendes et sur l’hôpital de Saint-Mein à Grézieu-le-Fromental.

M. le président a porté le matin même à M. de la Bâtie les remerciements de la Société, remerciements que celle-ci tiendra sans doute à renouveler.

L’assemblée s’associe par une approbation unanime aux sentiments qui viennent d’être exprimés par son président.